LETTRES DE GEORGES TACONET A CAMILLE FLEURY (1915 –1917)



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 31 janvier 1917 

Mon cher Camille

Quelques lignes seulement car j’ai pas mal à écrire aujourd’hui pour te dire que tu seras bien gentil d’envoyer la sanguine quand l’encadrement sera terminé aux Ducrocq (9 rue de Caligny Havre) J’en prendrai possession au moment de ma permission. J’avais proposé cette combinaison à Yvonne qui accepte d’autant plus volontiers que son père je crois n’avait pas vu la sanguine.

Mon cher Camille il fait si froid que le seul moment où je suis libre et où je pourrais regarder la photographie de la sanguine je n’en ai réellement pas le courage. Et dans la journées je n’ose, par une sorte de pudeur, la regarder devant les autres. Je ne l’ai pas vue depuis 4 jours. Heureusement aujourd’hui le froid diminue un peu.

Nous avons eu une de ces dernières nuits 18° au dessous de zéro. Enfin j’ai pu constater que je souffrais certainement moins du froid qu’autrefois. Et puis voila janvier terminé, l’hiver s’écoule. Enfin et surtout il est fort question pour nous d’un grand repos.
Dis moi si tu espères, comme moi, obtenir ta permission dans les tous premiers jours d’avril … Peut-être même la mienne aurait elle lieu dans les derniers jours de mars, mais pour Yvonne et ma famille je ne parle que des premiers jours d’avril pour rester au dessous de la vérité. Yvonne, Marie et Madame Ducrocq travaillent les Béatitudes d’arrache pied. Marie Thérèse les regarde-t-elle un peu. Va-t-elle tout à fait bien ? et Betsy ? et toi même ?

Je vous embrasse tous trois bien affectueusement.

Georges Taconet


P.S. Nous sommes sortis des tranchées il y a 2 jours. Cette fois cela a été un peu plus dur, bien que personnellement je n’aie été mêlé à rien. Mais en admettant que nous retournions encore aux tranchées, nous aurions encore 6 bons jours de repos. Donc n’ayez aucune inquiétude sur mon sort en ce moment.