LETTRES DE GEORGES TACONET A CAMILLE FLEURY (1915 –1917)
26 mars 1916
Mon cher Camille,
Merci très sincèrement de ta lettre du 22. Les détails de la mort de ce pauvre Benvesniste sont navrants. Je comprends que tu aies été touché par cette dernière marque d’amitié et je te répète la part très grande que je prends à ton chagrin.
J’ai reçu il y a trois ou quatre jours la fameuse lettre de Marie Thérèse avec adresse incomplète. Veux tu la remercier de ma part. Je vais écrire à Betsy pour la remercier de sa gentille carte.
Brusquement l’ordre de départ nous est arrivé cette nuit, puis, naturellement, contrordre. Mais nous devons partir demain matin. Où allons nous ? personne n’en sait rien. Les premiers temps cela paraît désagréable de rester ainsi dans l’ignorance, mais l’on se fait à tout et l’on suit même le mouvement avec une certaine indifférence. Le brusque départ n’indique d’ailleurs pas nécessairement un départ immédiat dans les tranchées – je comprends l’enthousiasme avec lequel tu as salué le Prince de Serbie. Le peuple Serbe a été tout simplement admirable. Aucun peuple ne s’est battu comme eux, et je crois que c’est un exemple unique dans l’Histoire.
Je te remercie de la part que tu prends à mon bonheur. Déjà un mois de séparation. Yvonne fait preuve d’un très grand courage. L’amour nous soutient tous les deux et nous nous sentons forts. Tu m’excuseras mon cher Camille de t’écrire brièvement, je vais être pris par une séance (deux mots illisibles). Je vous embrasse tous trois bien affectueusement.
Georges Taconet
P.S. Bien content de savoir Marie Thérèse réellement mieux. J’espère apprendre prochainement qu’elle est tout à fait bien.