Poèmes mis en musique par Georges Taconet

Invocations d'Automne

II

Les nuages légers sèment là-haut leur fuite,
Les derniers feux d'été meurent au firmament.
Mais, dans le grand silence où plus rien ne palpite,
Qui donc a répandu ce mol enivrement ?


C'est toi, mélancolique Automne, qui t'avances.
Je t'attendais, charmeur de mes mornes soucis,
Et déjà tu m'emplis de confuses cadences,
Eveillant sur tes pas les rêves indécis.

Ah ! de suprêmes fleurs la tête couronnée,
Arrête un peu ta marche, Automne qui descends,
Pour préparer bientôt le déclin de l'année,
Un calme chemin d'or sous les bois jaunissants.

Prends mon front dans tes mains miséricordieuses,
Vision souriante et pensive à demi,
Par les après-midi lentes et radieuses,
Devant l'eau qui reflète un beau ciel endormi.

Et quand le jour sera comme las de sa gloire,
Fais, avec des appels par mon âme entendus,
Monter du passé mort et de la tombe noire
Les visages charmants de mes amis perdus.

Chœur indulgent, surgi des funéraires mousses,
Tournant vers moi des yeux que mes doigts avaient clos,
Qu'ils viennent, de leurs voix plus graves et plus douces,
Me vanter leur extase et leur divin repos ;

Et que, m'abandonnant sans luttes à tes charmes,
Sentant sous ta douceur ma poitrine éclater,
De trop de songes lourd, gonflé de trop de larmes,
Automne, dans ma voix je te laisse chanter.

Louis Le Cardonnel




Extrait de "Poèmes", édité par le Mercure de France en 1928, pp.124/125.

Le poème intitulé Invocations d'Automne comporte quatre parties, numérotées I à IV. Seule a été mise en musique la deuxième partie ci-dessus (à l'exception de la première strophe, ici en petites lettres).



catalogue n°35